Roger MANCEAU

Roger MANCEAU

 

Nathalie et Catherine MANCEAU, ses filles, ont la douleur de nous informer du décès de leur cher Papa, Roger MANCEAU, Déporté-Résistant.

 

Né à Saint-Pierre-des-Corps (37) en 1922, Monsieur Roger MANCEAU, a vécu à Paris (75) et à Sens (89) avec ses parents et ses frères, au gré des mutations de son père militaire.

A l’exode de 1940, sa mère décide de partir pour Saint-Martin-le-Beau, commune d’Indre-et-Loire (37) où passe la ligne de démarcation avant de plonger vers le sud. Si près de la ligne, il aide les soldats à la franchir, puis des réfractaires au STO. Il travaille pour un marchand de glace sous contrat avec les Allemands. Afin de répondre aux commandes, une autorisation permanente est donnée aux employés de franchir la ligne de démarcation. Roger passe ainsi des courriers en zone libre pour les familles, puis des courriers pour la Résistance.

En 1943, Roger est recensé pour le STO. Il était hors de question de se présenter au recrutement. Prétextant vouloir aller dire au revoir à son père, en poste en zone Libre à Vichy, il obtient un laissez-passer pour s’y rendre. Arrivé sur place, il entre dans la clandestinité grâce aux relations de son père et s’engage dans l’Armée Secrète le 02 juillet 1943.

Il se cache à Feurs (42) et participe à des actions de reconnaissance pour des largages et conduit des réfractaires STO dans le maquis. Le 06 juin 1944, c’est le débarquement et l’accélération des actions de la Résistance. Le 10 juin 1944, dans la nuit, 4 foréziens (Jean BEAU, le chef du groupe, Georges BLONDY, Roger MICHEL, Jean PERONNET) et Roger (dit le Parisien) partent récupérer des fûts d’essence. La mission accomplie, Jean Beau annonce qu’il y en a une seconde. Retour à Feurs sur les premières heures du 11 juin 1944 où tout va s’arrêter. Le groupe est arrêté par la Gendarmerie Allemande et conduit à Clermont-Ferrand au siège de la Gestapo. Après des interrogatoires musclés et une sentence de peine de mort, le 19 juillet 1944, ils sont évacués avec d’autres détenus vers Compiègne (60), puis vers l’Allemagne par le convoi du 28 juillet 1944. Après 4 jours d’un voyage terrifiant et épuisant, ils arrivent dans le camp de concentration de Neuengamme, près de Hambourg. Roger MANCEAU devient le matricule 39499 – catégorie NN ("Nacht und Nebel", c’est à dire déporté condamné à disparaître).

Trois de ses compagnons partent rapidement dans des Kommandos. Jean BEAU et lui restent ensemble et sont affectés au Kommando de la Kriegsmarine en août 1944, près de Brême. Au début le travail consiste à déblayer la ville bombardée par les Alliés, puis quelques mois plus tard il est affecté dans une fonderie au sud de la ville en tant que charpentier métallique et au coulage du béton. Dans les décombres, Roger cherche de la nourriture comme tous les autres puis de la chaleur auprès du béton qui prend. Une radio est trouvée et les Allemands veulent la réparer. Jean BEAU, radio de métier, la répare. Cela lui permet de confectionner en cachette une seconde radio et avec Roger, ils écoutent Londres, au risque de se faire fusiller. Cette fenêtre ouverte sur ce qui se passe côté Alliés est une bouffée d’espoir, auquel Roger va s’accrocher de toutes ses forces pour tenir.

Le camp de Neuengamme est évacué le 06 avril 1945. C’est à ce moment-là que Roger est séparé de son compagnon Jean BEAU, qu’il ne reverra pas. Après un périple en train de 7 jours, il arrive au camp de concentration de Sandbostel le 13 avril. La direction du camp se délite, les SS partent, c’est le chaos et le typhus qui sévissent désormais et les morts se comptent par milliers. Le 29 avril 1945 les Anglais libèrent le camp et découvre l’horreur.

De retour à Paris le 10 juin 1945, soit un an après son arrestation, il apprend que son père y est aussi. Il décide toutefois de partir rejoindre sa mère et ses frères à Saint-Martin-le-Beau.

C’est le début d’un long combat : se reconstruire physiquement, psychologiquement dans un monde qui avait du mal à admettre l’horreur Nazi.

Il crée dans le village un commerce de primeur et se marie le 01 mai 1948, pour fonder une famille avec 3 enfants. Il continue à aller de l’avant même si cela est parfois très compliqué. Il travaille dur, mais le corps a été meurtri, il faut lever le pied. Il vend le commerce et entre en tant que civil à l’Ecole d’Application de Train de Tours en 1963.

En parallèle à cette vie de famille, Roger met tout en œuvre pour respecter le pacte fait avec ses compagnons foréziens arrêtés avec lui : « Si l’un d’entre nous rentre, il devra raconter aux familles ce qui s’est passé ». Roger a donc œuvré d’une part auprès de la ville de Feurs pour saluer la mémoire de ses camarades avec la construction d’un monument à l’endroit exact de leur arrestation, et d’autre part auprès des descendants de 4 foréziens disparus en déportation pour leur faire connaître les derniers instants de la vie de leur parent.

Enfin, Roger a contribué au devoir de mémoire, portant haut la devise du camp de concentration de Neuengamme « N’oublions jamais », en s’impliquant dans diverses associations d’anciens combattants et déportés-résistants (association de Neuengamme, FNDIR-UNADIF, DPLV, les médaillés militaires, la Fédération Nationale André MAGINOT (FNAM) et la Société des Membres de la Légion d’Honneur SMLH). Il a organisé un rassemblement national du camp de Neuengamme à Tours, et des rassemblements plus modestes des anciens de son Kommando, la Kreigsmarine. Il était également très engagé dans le Concours National de la Résistance et de la Déportation. Il faisait de nombreuses interventions dans les écoles, collèges et lycées pour raconter aux jeunes son parcours, afin qu’ils n’oublient pas. Pour son engagement envers la jeune génération, l’État l’a fait Officier dans l’Ordre national de la Légion d’Honneur en 2016.

 

Roger Manceau était Officier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur, titulaire de la Médaille militaire, de la Croix de Guerre 1939-1945 avec palme, de la Croix du Combattant volontaire, de la Croix du Combattant volontaire de la Résistance, de la Croix du Combattant et de la Médaille de la Déportation pour Faits de Résistance.

 

 

Monsieur Roger MANCEAU s’est éteint le 17 janvier 2023 dans sa 101ème année.

UNADIF - FNDIR